Le billet de Marie : Si j’aurais su, j’aurais pas lu

Marie est arrivée chez nous en immersion avec son bagage littéraire, soucieuse de découvrir les coulisses d’une Maison d’écriture haute couture. Pour ouvrir le bal de ses publications, la première se plaît à venir à la rescousse de la langue française. Sa syntaxe malmenée, ses expressions écartelées, n’en jetez plus la cour est pleine !

« Orthographe. La science qui épelle avec l’oeil à la place de l’oreille. Défendue avec plus de chaleur que de lumière par quelques échappés d’asiles. »  – Ambrose Bierce

À toi qui penses que chacun voit midi à quatorze heures

À toi qui tu ne sais toujours pas c’est qui qui a raison

À toi qui te considères comme le bouquet mystère

À toi qui clos tes discours par « bon je me comprends » et tes réparties de « je dis ça, je dis rien » mais qui en dis toujours trop

À toi qui penses qu’au jour d’aujourd’hui, on est toujours pas fixé, mais que ça devrait arriver incessamment sous peu

À toi qui détestes ceux qui croivent tout savoir

À toi qui rêverais de leur rendre l’appareil

À toi qui ne sais toujours pas où est donc Ornicar

À toi qui aimes aller au coiffeur, au dentiste, au fleuriste

À toi qui souhaites toujours un bonne anniversaire

À toi qui travestis les expressions, qui vois la porte ouverte à toutes les fenêtres, et qui t’attardes sur la goutte d’eau qui met le feu aux poudres

À toi qui te places toujours avant l’autre dans une phrase

À toi qui adores y feuilleter, y dire, y faire, y montrer

À toi qui parles de la bague à ta mère et de la maison à ta cousine

À vous qu’on aime comme même, avec le franglais ou la langue fourchée

Hâtez-vous lentement ; et sans perdre courage,

Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage :

Polissez-le sans cesse et le repolissez,

Ajoutez quelque fois et remasterisez

Mais cette langue surtout, ne cessez pas de l’aimer.

 

Marie Hauvy, en immersion dans la Maison Trafalgar

Photographie : Eugenio Mazzone