Les associées dévoilent les coulisses de notre Maison au magazine Luxus Plus. Au cours d’une interview croisée, elles présentent les fondements de notre entreprise littéraire, qui se bat depuis sa création pour une écriture pérenne, sur-mesure et haute couture dans le monde professionnel. Nos services, notre mission, nos projections et nos ambitions, découvrez les aspirations de notre Maison en découvrant les réponses de Marion et Bérengère.
Bérengère Wolff & Marion Derouvroy, associées de la Maison Trafalgar : « En déclarant sans cesse que tout tient de l’exception, plus rien n’apparaît comme exceptionnel. »
« Vous avez l’aplomb, nous avons la plume ».
Ce sens de la formule est au coeur de l’ADN de la Maison Trafalgar, une Maison d’écriture fondée en 2015 par un duo de lyonnaises très portées sur le poids des mots. Directrice associée, Bérengère Wolff est ainsi diplômée de l’EFAP et a oeuvré précédemment pour plusieurs médias et entreprises reconnues pour leur création de contenus, dont Marie-Claire, Paulette et Warner Bros. De son côté, Marion Derouvroy a fait les classes préparatoires Hypokhâgne et obtenu un double master en lettres et commerce à l’IAE Lyon School of Management.
Leur discours – foncièrement optimiste – tranche nettement avec l’injonction à des formats de plus en plus courts et la stigmatisa réservée aux personnes de sensibilité littéraire.
Ce positionnement hautement différenciant, à rebours de la toute puissance technologique et du diktat d’un « snack content » mal digéré, vite oublié, a permis au duo de se faire repérer par de grandes Maisons de luxe et toutes sortes d’entreprises, de la multinationale à l’artisan local.
L’occasion de revenir avec elles sur le savoir-faire qu’elles ont su réhabiliter et moderniser – le Portrait – avec une équipe pluridisciplinaire. Cette rencontre constitue aussi une belle opportunité d’évoquer la place de l’écrit à l’ère du numérique et de l’intelligence artificielle générative. Elle permet aussi de comprendre comment améliorer son style d’écriture et dompter cette « société du poisson rouge » – ce handicap de la mémoire flash – dépeint par Bruno Patino dans son ouvrage éponyme et dans laquelle l’hyperconnexion nous tous a précipités.
Luxus Plus : Vous avez choisi comme signature audacieuse et insolite “Maison d’écriture haute couture”. D’où vous est venue l’idée d’amener l’univers du luxe dans la rédaction ? Quel constat sur le marché de l’écriture vous a incité à lancer la Maison Trafalgar ?
Bérengère Wolff : À la création de la Maison Trafalgar, l’objectif était d’emprunter au vocabulaire de l’artisanat et de la haute couture pour revaloriser le savoir-faire littéraire et contrer une forme d’industrialisation des récits. En constatant que le marché de l’écriture en entreprise était moribond, nous avions à cœur de réintroduire le goût des mots dans la sphère professionnelle. L’objectif étant de ne pas laisser ce marché de l’écriture s’appauvrir en devenant un marché du contenu prêt à consommer, pour ne pas dire prêt-à-porter.
Marion Derouvroy : Nos clients ont conscience que tout est devenu tristement généraliste, impersonnel, que la qualité et l’inspiration se perdent. Au sein de notre entreprise, ils sont heureux de trouver un espace dans lequel ils ne se sentent plus à l’étroit. En artisans des mots, nous n’avons jamais dévié de notre ambition d’une écriture sur-mesure ni de notre stylistique soignée. C’est pour cela que les plus grandes Maisons et références du luxe nous choisissent comme partenaire privilégié. Dans l’écriture, comme dans la haute couture, tout est une question d’exigence dans l’approche et de finesse d’esprit.
LP : En quoi votre métier diffère-t-il de celui de l’écrivain public ou du très médiatisé mais discret ghostwriter ?
Bérengère Wolff : C’est d’abord une question de positionnement. Nous ne sommes ni journalistes, ni biographes, ni rédacteurs freelance ou ghostwriters. Nos clients ne nous demandent pas de nous fondre dans le décor comme le ferait un fantôme, ou de renoncer à notre style pour coller à un autre déjà existant. Ils viennent au contraire chercher notre regard en tant que Portraitistes littéraires, à savoir notre sensibilité, notre créativité avec un soupçon d’anti-conformisme, aussi. C’est ensuite une question d’engagement. Nous sommes dans une époque où la compétence rédactionnelle est souvent précarisée, où les plumes sont dévalorisées. Notre Maison ne transige pas sur la sécurité de l’emploi et le développement des carrières en interne. Plutôt que de constituer un collectif de rédacteurs indépendants, nous avons pris le parti d’une véritable dynamique d’atelier. Aux couteaux suisses, nous préférons les spécialistes.
Marion Derouvroy : Le métier de Portraitiste, comme tout métier de création, demande beaucoup de calme et de concentration. Ce respect du travail d’écriture et du temps que l’on se donne rendent nos Portraitistes encore plus fidèles à cette Maison ; certains y sont depuis la création. Tous nos écrits passent impérativement par un comité de lecture qui rassemble tout ou partie de l’équipe de la Maison. Cela permet à chacun de perfectionner, de sublimer son travail ; cela présuppose beaucoup de bienveillance mutuelle, et surtout de l’humilité. Une signature ne s’arrache pas, ne se vole pas, ne s’imite pas ; elle se construit chaque jour par un attachement de chacun d’entre nous à la pérennité de l’entreprise.
LP : Pourquoi avoir choisi de restaurer avec une touche de modernité la tradition du portrait ?
Bérengère Wolff : Pour se construire une place de choix, conformément à son ambition initiale, la Maison Trafalgar a effectivement fait du portrait un métier à part entière, original. Mais avant d’être modernisée, la tradition du portrait méritait d’abord d’être réhabilitée. Pour certains, il évoque un jeu d’ego, rappelant l’hagiographie, ou des textes écrits à coup de chirurgie stylistique. Ceux que nous pouvons lire dans la presse souffrent parfois d’un excès de storytelling, d’une starification qui ne permet plus d’être ému pour de vrai. Au-delà des biographies flatteuses trop peu sincères, on peut aussi penser aux présentations creuses beaucoup trop austères, comme le portrait chinois, qui tient debout avec trois questions et trois réponses laconiques. À l’inverse, on trouve aussi des écrits plus généreux, mais qui adoptent une certaine linéarité chronologique, en utilisant des dates clés comme seuls piliers. En réalité, le portrait est un format qui permet une grande liberté dans la construction narrative. Repenser la tradition du portrait écrit, consistait avant tout à le sortir de ses clichés ; c’est en ce sens que nous l’avons modernisée.
Marion Derouvroy : Si nous refusons de niveler vers le bas, notre ton est bien en phase avec notre époque. Notre équipe n’écrit pas avec une plume d’oie, à la lueur d’un ciel étoilé. Pour autant, notre Maison d’écriture haute couture a su remporter les premiers prix face à des startups tech qui n’existent même plus aujourd’hui. En tant qu’entrepreneurs-littéraires, nous sommes très connectés au monde de l’entreprise. L’utilisation même que nos clients font de nos écrits est moderne, loin de la seule utilisation papier. Le digital est poussé et nos écrits peuvent s’accompagner de déclinaisons photographiques ou vidéos. En outre, nos Portraits audios permettent de tisser des bulles immersives au sein d’un musée d’entreprise.
LP : Comment fait-on pour gérer une entreprise littéraire dans un présent marqué par l’intelligence artificielle générative et l’érosion du temps d’attention ? Est-ce que ce nouveau paradigme bouleverse vos méthodes de travail ou complexifie les rencontres avec vos clients ?
Bérengère Wolff : Nous connaissons la valeur de notre signature et ne craignons pas les dérives de l’intelligence artificielle. Dans notre équipe, nous sommes certains que ces limites, à force d’être sans cesse poussées et repoussées, encourageront encore davantage les clients à se tourner vers des experts. La surabondance des contenus générés par l’IA fait justement ressortir la qualité des créations humaines, quand elles relèvent d’un véritable savoir-faire et qu’elles font l’effort de ne pas être purement fonctionnelles ou informationnelles. Au-delà de notre signature textuelle, nous pouvons aussi compter sur la force de notre méthode et la fiabilité de nos entretiens d’extraction. L’IA n’est pas en capacité de récolter minutieusement cette matière première. Quant à l’érosion du temps d’attention, il est vrai que l’immédiateté a fait de la prose une matière volatile qui se consomme et puis s’oublie. Nous passons donc notre temps à sensibiliser sur l’importance de prendre ce temps.
Marion Derouvroy : Le constat est surtout criant dans les pratiques du travail et du numérique, où la lecture se fait souvent en diagonale. « Contenus à impact », et autres « punchlines » dénotent bien davantage d’une sorte de lutte, de violence à l’écriture, que d’un quelconque plaisir à la lecture. Aurions-nous aujourd’hui la concentration d’un poisson rouge dans son bocal ? Est-ce la faute du poisson ou du bocal ? La concision est à la mode. Le lecteur n’a jamais le temps. Il est sans cesse sollicité par les notifications en cascade, les pop-ups, les messages. Il faut donc aller vite, avec des phrases courtes. Un vocabulaire basique. Des sauts de lignes. Même si cela est très ambitieux, nous travaillons à faire reculer ces mauvaises habitudes. La question est moins le temps d’attention que la diffusion de textes qui ne sont pas pétillants pour l’esprit. Blâmer le lecteur revient à se défausser de sa propre responsabilité. C’est à la plume d’intriguer, d’inviter à quitter la surface des choses, pour emmener en profondeur.
LP : Pour quelles raisons vos clients font-ils appel à vos services ? Quel travail préalable doivent-ils mener avant de vous rencontrer ?
Bérengère Wolff : Nos clients font appel à Maison Trafalgar lorsqu’ils ont besoin d’un écrit socle pour accompagner leurs enjeux ou un tournant de l’entreprise : cession, transmission, départ à la retraite, nomination, recrutement, développement de la marque employeur, création de leur intranet, repositionnement, célébration d’anniversaire… Pour eux nous réalisons des Portraits iconiques de marques mais aussi des Portraits de lieux, d’ateliers, de produits, de collections ; ils peuvent être individuels ou croisés ou prendre la forme de galeries de Portraits de collaborateurs ou d’artisans. A côté de cela, nous réalisons des Écrits Coutures dédiés à des thématiques. Mais si la plupart frappent à notre porte c’est avant tout pour se renouveler, actualiser leurs lignes, expliciter leur activité par le biais d’un écrin littéraire à la mesure de leur savoir-faire. Il s’agit aussi d’enchanter leurs propres clients, de singulariser leur signature ou leur prise de parole. À ces exemples, s’ajoutent tous ceux qui permettent de sonner la fin du millefeuille textuel : contenus trop éparpillés, trop redondants, trop consensuels.
Marion Derouvroy : Sans compter que dans le monde du luxe, nous assistons soit au minimalisme extrême – les équipes n’osent plus écrire -, soit au bal des superlatifs. Tout est majestueux et unique, tout n’est que quintessence et excellence. Mais en déclarant sans cesse que tout tient de l’exception, plus rien n’apparaît comme exceptionnel. Le fait que nous ne soyons pas sectorisés plaît d’ailleurs beaucoup, car à force de compter sur les mêmes rédacteurs spécialisés, il devient de plus en plus difficile pour les marques de se distinguer. Quant aux prérequis, il n’y en a pas : nos clients se laissent guider par l’équipe Trafalgar. Beaucoup étaient essoufflés des briefs chronographes qu’ils avaient eux-même à construire, et de ce rapport descendant entre le donneur d’ordre et l’exécutant. Les Maisons de luxe nous laissent régulièrement carte blanche ; nous travaillons avec certaines de manière récurrente depuis plus de 5 ans, et en phase de validation, elles ne touchent parfois qu’une virgule.
LP : De nombreux témoignages relèvent “la justesse du mot” parmi vos forces. Quels conseils donneriez-vous pour améliorer son écriture ?
Marion Derouvroy : « Pour bien écrire, il faut une facilité naturelle et une difficulté acquise. » Cette citation de Joseph Joubert est très appréciée de nos équipes. Le premier conseil pour améliorer son écriture est d’abord de travailler et de s’engager pleinement dans ces efforts. Il faut briser le mythe d’un talent qui tombe du ciel, fuir les lieux communs, confronter son écriture et remettre cent fois son ouvrage sur le métier. Ce n’est pas pour rien que nous sommes sensibles à tout ce que réclame l’artisanat et l’exigence d’un geste. Nous comptons de nombreuses Entreprises du Patrimoine Vivant comme clientes, car nous nous retrouvons dans l’approche de nos métiers respectifs. La Maison Trafalgar est à cet égard partenaire officiel de l’Institut National des Métiers d’Art.
Bérengère Wolff : Le second conseil est de continuer de s’inspirer. Au sein de la Maison Trafalgar, entre une pépite vidéoludique et un film de samouraïs en noir et blanc, les sons de la West Coast se font l’écho des opéras de Faust. On y loue l’art sous toutes ses formes, on y déguste les philosophes antiques comme les écrivaines à la page, on croque les héroïnes de la bande dessinée autant que les beaux voyages. Chez nous, chacun a amené dans ses bagages ses connaissances, ses principes, une partie de lui-même ; c’est toute une nébuleuse d’inspirations qui s’étend.
LP : Vos clients se rendent dans la Maison Trafalgar pour vivre l’expérience de l’entretien d’extraction. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce lieu et notamment le rôle que joue la musique dans ces entretiens ?
Marion Derouvroy : Nous privilégions toujours des rendez-vous au sein de notre propre salon, plutôt que des rencontres furtives dans un café bruyant. Qu’ils soient en France ou à l’étranger, nos clients se rendent dans la Maison Trafalgar pour vivre l’expérience de l’entretien d’extraction, qui précède chaque phase d’écriture. Une manière pour eux de sortir de leur bureau, de couper un temps avec leur quotidien ou de déposer l’armure professionnelle quand le besoin s’en fait sentir.
Bérengère Wolff : Pour réaliser des écrins textuels cousus main du premier mot au point final, la Maison Trafalgar a calibré sa promesse dans les moindres détails. Notre pianiste peut jouer pendant plusieurs heures lors d’une performance personnalisée, prenant en compte les goûts musicaux de notre client. Ces notes sont autant de repères émotionnels discrets au cours de l’entretien, qui encouragent une parole libre et complètent l’expérience sur-mesure de notre Maison d’écriture haute couture.
LP : Trafalgar, ce ne sont pas seulement des textes ciselés sur papier, ce sont aussi des mots qui résonnent. Quel est l’apport de la Maison dans les concours d’éloquence ?
Bérengère Wolff : Au-delà de son expertise de niche, notre Maison d’écriture est devenue, au fil des années, une experte du langage à l’écrit comme à l’oral. Nos clients nous confient l’écriture de leurs discours ou de tribunes qui éclairent leurs analyses, leurs opinions. Pour répondre au mieux à cette demande, nous avons également déployé notre pôle en art oratoire.
Marion Derouvroy : Rhétorique, techniques de conviction, prises de paroles en public, la Maison Trafalgar intervient aussi bien dans les conseils d’administration stratégiques que dans les maisons d’arrêt. Si nous accompagnons depuis plusieurs années les directions, les équipes commerciales ou de communication, il est fondamental de comprendre que les mots sont à tous et nous sommes toujours aussi désireux de faire bénéficier le plus grand nombre des pouvoirs de la parole.
LP : On dit la jeune génération incapable d’écrire convenablement, trop occupée à écrire en langage SMS tandis que les professions littéraires ont été longtemps dévalorisées. Êtes-vous néanmoins optimiste sur la pratique de la langue française ? Pensez-vous qu’il faut redonner plus de place aux profils littéraires dans le recrutement en entreprise ?
Bérengère Wolff : Nous sommes optimistes et préférons voir le verre à moitié plein ! La maîtrise de la langue française n’est pas une question de génération. Les journées portes ouvertes que nous avons l’habitude d’organiser pour aller à la rencontre des jeunes et leur présenter notre métier, en témoignent. Ce n’est pas l’attrait pour l’écriture qui manque, pas plus que les profils littéraires ! Nous les croisons d’ailleurs à des postes de direction, dans les ressources humaines, le journalisme et parfois frustrés, asséchés, dans les agences de communication. Ce qui manque, ce sont surtout des débouchés et c’est probablement ces perspectives qui vident les filières littéraires de leurs étudiants.
Marion Derouvroy : Nous ne recrutons pas uniquement des diplômés d’études de lettres mais des sensibilités littéraires. Nous nous sommes entourées de talents bruts qui ne se seraient jamais figurés portraitistes littéraires. Certains ont rejoint l’aventure avec leur bagage sociologique, juridique, parfois même scientifique. Les excellents littéraires se cachent vraiment partout ! Beaucoup de gens adorent écrire, veulent écrire mais peu parviennent à en faire leur métier. Malheureusement, les rédacteurs sont d’autant moins motivés qu’ils sont souvent mal payés et n’offrent pas la même qualité en termes de prestations. Cela alimente la croyance selon laquelle les littéraires ne sont pas bien formés. Certains se figurent, enfin, les esprits littéraires complètement déconnectés du monde économique. On les montrera parfois, dans l’entrepreneuriat, comme des originaux. Nous avons beaucoup d’admiration pour celles et ceux qui prennent le problème à la racine en créant des entreprises et en renforçant la belle communauté d’entrepreneurs-littéraires !
LP : Trafalgar, victoire anglaise. Quelle place accordez-vous à la langue de Shakespeare ? Ambitionnez-vous “to cross the channel” ?
Bérengère Wolff : Comme plusieurs de nos clients disposent eux-mêmes d’une clientèle internationale, nous travaillons en anglais avec la même exigence qu’en français. Avec un tel nom, il aurait quand même été ironique que la Maison Trafalgar ne soit pas aussi carrée de l’autre côté de la Manche. Dans la langue de Molière comme de Shakespeare, nos adaptations secouent les lieux communs.
Marion Derouvroy : Il est évident que nous bannissons les traductions littérales et défendons le droit à une belle langue, à une écriture créative et précise dans tous les pays. Nous avançons toutefois avec humilité. Comme l’a écrit Voltaire, « apprendre plusieurs langues c’est l’affaire de peu d’années, être éloquent dans la sienne, c’est l’affaire de toute une vie ». Nous sommes très heureux que de nombreux de nos écrits Trafalgar soient traduits en italien, en espagnol, en mandarin, ou encore en néerlandais. Pour ce qui est de l’avenir, notre Maison ne ferme aucune porte. To be continued…