En traversant les décennies et les frontières au service de la diplomatie française, Bruno Asseray a marqué nombre de ses collègues par son affabilité et son engagement sans faille. À commencer par son équipe en Afrique du Sud, qui a tenu à le remercier en lui offrant un cadeau de départ à la retraite particulier : une invitation à se rendre dans la Maison Trafalgar pour confectionner un Portrait écrit et photographique à la mesure de ses accomplissements. Notre Maison s’est attachée à ancrer dans un récit aussi émotionnel que vivant le parcours foisonnant de celui qui a atteint le plus haut niveau du dispositif diplomatique français, et surtout côtoyé les milieux artistiques, politiques et économiques de neuf pays dispersés sur trois continents. Son Portrait écrit a su tenir sa promesse de ne rien omettre de ce professionnel qui tient le service public en haute estime, de ce passionné de photographie et d’opéra, ou de ce voyageur invétéré devenu père, puis grand-père ; la Maison Trafalgar a mis tout son coeur et l’énergie de son savoir-faire dans cette réalisation qui a définitivement su toucher l’homme derrière la fonction. 

Extraits de son Portrait : 

« Dans ses cantines emplies de quelques milliers de photographies argentiques, Bruno a de quoi se replonger instantanément dans sa carrière passée en transit. Il suffit de redécouvrir les clichés encore en vrac, et les étendues désertiques reviennent en ressac, tout comme ces paysages à la nature démentielle ou ces villes qui se plaisent à tutoyer le ciel. Des images promptes, aussi, à réveiller l’excitation de ses premiers pas sur le tarmac ivoirien ou le bouleversement qu’il connut dans le sillage du drame haïtien. Les décennies dans la coopération se superposent alors à celles de moments de stupéfaction. Émergent ici une rangée de chevaux caparaçonnés dans la plus pure tradition tchadienne, et des cavaliers au triple galop qui lui réservent un accueil frappant au nom de leur sultan ; dans cette oasis, les conditions frustes sont rehaussées de larges tapis et de plateaux d’argent. Bruno se remémore également la coutume nipponne qui l’incite à se décaler de quelques sièges à l’opéra, sans plus d’explications ; voilà qu’il se retrouve à apprécier la musique de Marin Marais en partageant son balcon avec l’Empereur du Japon. Et la vie d’expatrié au service de sa patrie continue de se recomposer, à l’aune de toutes les cultures qui lui ont tendu les bras, de ces voyages avec sa famille qui n’a eu de cesse de l’accompagner dans cette longue saga. »

« Les latitudes exotiques semblaient encore floues au fils d’aviculteur qui passait ses dimanches à ramasser les œufs, et les semaines à honorer un investissement scolaire « qui ne décornait pas les bœufs ». Le directeur acharné de travail, qui avait pour habitude d’impressionner ses collaborateurs, inspirait pourtant à ses professeurs bien d’autres commentaires : « pourrait mieux faire s’il s’employait. » Et si le seul garçon de la fratrie parvint à enjamber les pronostics qui le voyaient finir à la droite de son père, c’est que ses parents ont fait preuve de cette lucidité dont il est aujourd’hui légataire. Il y a d’abord eu cette décision très lourde d’envoyer le fiston au collège public, loin de cet établissement tenu par une religieuse aussi intolérante qu’autocratique. Puis, le petit lecteur assidu qui s’ébaudissait tant à la lecture des portraits sociaux de Zola, de Mérimée que des verniennes épopées fut entendu dans ses désirs d’escapades et d’évasion. »

« À peine eut-il le temps de célébrer sa réussite que le fringant titulaire de la fonction publique fut happé par une mission en Asie. Combinant les rôles d’attaché culturel et de directeur du centre culturel de Hanoï, Bruno eut l’occasion de satisfaire son penchant pour une discipline qui ancre les actions pour de bon. Car le féru d’architecture, qui s’était déjà illustré par des extensions de bâtiment pour y accueillir salle de spectacle et laboratoire de traitement de diapositives, changea d’échelle dès son arrivée au Vietnam : la transformation de l’ancienne imprimerie du journal communiste en centre culturel flambant neuf avait de quoi faire vibrer ce bâtisseur dans l’âme. De la conduite des travaux rendus épiques à la mise en place d’une programmation de lancement, Bruno fut étreint par un tel accaparement qu’il brillait par son absence au sein de son propre appartement. »

« Les prochains desseins ne sont certes qu’à l’état de croquis, mais Bruno sait d’ores et déjà qu’il lui faudra d’abord renouer avec les copains d’antan et profiter pleinement de Roman et Valentine, ses deux petits-enfants. Il y a aussi de quoi retaper dans sa maison de Mâchelles, ce village où flotte encore l’odeur de caramel que sa mère avait l’habitude de couler dans des coquillages. Plus encore que ces cantines débordant de souvenirs avec lesquels frayer et qu’il lui reste à trier, Bruno file en concrétiser d’autres, gardant précieusement ces « deux huiles essentielles » qu’il n’a cessé de distiller : entreprendre et partager. Ainsi, celui qui n’a jamais été « configuré pour le contemplatif » a-t-il pris l’habitude de suivre en permanence sa volonté profonde, en se plaçant toujours dans la pulsation du monde. »