Cet été, vous avez une carte à jouer.
Contre l’injonction du régime estival, il est urgent de cesser d’amaigrir notre rapport à l’écriture. Comme un exercice quotidien de musculation de l’esprit, il est tout aussi sain de travailler sa langue. Si les mots ne sont pas encore vos compagnons favoris, profitez de l’été pour vous échauffer, en commençant par de petites foulées. Familiarisez-vous avec le terrain de l’expression et apprenez à manier le crayon avec la dextérité du lanceur de javelot. Pas à pas, vous rectifierez le tir, et vos mots, de plus en plus précis et aiguisés, finiront par toucher la cible : vous arrivez au sprint final, sortez la pointe ultime. Vous pourrez alors étirer vos phrases et vos membres engourdis, exposer vos sentiments comme votre corps au soleil; le jeu en vaut la chandelle, et le voyage l’insolation.
Après tout l’écriture, c’est comme le vélo : ça ne s’oublie pas. Et il est un mérite de pédaler un peu. L’essentiel étant de laisser une trace, votre trace, par un style bien à vous, même au dos d’une photo de vaches normandes. Pour combattre, à l’épreuve du temps qui passe, l’obsolescence des idées et l’oubli des âmes. Pour réapprendre à parler en écrivant, réapprendre à écouter en lisant, réapprendre à donner en prenant le temps de s’arrêter.
Il y a votre course et celle des missives que l’on s’envoie, qui traversent des kilomètres d’une boîte à lettres à une boîte à l’autre. Quelques lignes suffisent à faire renaître le charme, la délicatesse des termes qui, couchés sur le papier pour une autre destination, se teintent d’une toute autre saveur en changeant de maison, prennent d’autres amplitudes et d’autres significations.
Il est primordial, mais aussi profitable, de s’octroyer une parenthèse, ce tête-à-tête en solitaire. Et si vous n’avez personne à qui écrire, si vous avez peur de finir sur un frigo, au milieu d’un album jauni ou dans une boîte mail saturée, écrivez-vous cette carte postale, et accordez-vous le temps de prendre de vos nouvelles.
Marie Hauvy, en immersion dans la Maison Trafalgar
Photographie : Natalia Lyczko