Portrait croisé d’associés, Xavier et Bertrand
Si Xavier et Bertrand Rousselle – « de Terre Adélice, et c’est tout » – sont d’un cru généreux, c’est parce qu’ils ont mûri au soleil vermeil des familles nombreuses. Dans une quête qui conduira de Madagascar à Saint-Sauveur, du calisson à la praline, l’itinéraire du glacier bio Terre Adélice est de ceux qui s’achèvent aux origines, et aiguille les papilles vers les régals dont la Nature fourmille. Les desserts que les frères proposent d’ailleurs aux gourmands descendent de ceux qu’ils concoctaient dans leur sorbetière, sous la direction des tantes et grands-mères.
À cette époque où les cornets se vendaient presque à la criée par les fondateurs, la rocambolesque logistique tutoyait l’épique avec l’arrivée de l’été. Les enfants de Xavier et Bertrand, eux aussi arrangés en quatuors, accouraient aux gîtes exigus, loués à la saison afin de conserver cette main d’œuvre à portée de châtaignes à ramasser ou de fruits à éplucher. Régulier comme un fleuve dont la surface placide dissimule le débit, le succès de Terre Adélice finit, dix ans plus tard, par craqueler les murs trop étroits de la ferme où presque toutes les recettes s’inventaient.
Mais avant que les diplômes ne couronnent les efforts, avant que Xavier n’étanche sa curiosité dans les arcanes de la matière et que Bertrand ne se méfie du dogme chimique dispensé en école agricole, de premiers enseignements furent prodigués par un professeur muet faisant classe sur le tableau des paysages, et qui n’est autre que l’Ardèche. L’Ardèche, où ces jeunes vacanciers qu’on croirait aujourd’hui natifs du pays se levaient dans le pied-à-terre familial, coiffés d’une imprenable vue sur les Alpes. L’Ardèche, qui abrita les baguenaudes et les chiquenaudes des frangins ayant pour voisins Madame Valla et ses fromages au plafond.