Extraits : ARCHE
Portrait iconique de marque
D’évolutions en révolutions, j’ai été primé, opprimé, obligé, négligé, classé après avoir été cassé par les grandes pages de l’Histoire. Mais la renaissance est le propre des vins, et les passionnés se sont retroussé les manches pour le Sauternes. L’on raconte même que leurs efforts ont présidé au choix de nos élus, et que mon arche a connu son triomphe à l’Élysée, auprès de Jacques Chirac et de René Coty. On se rappelle ainsi mes fameuses « crèmes de tête » qui en ont fait tourner plus d’une ; chacun ressort en tout cas de la dégustation avec la mangue qui surprend au bout de la langue.
Quitte à entrer dans les subtilités, évoquons le potentiel de garde de mes liquoreux – quand je les observe, je remarque qu’ils développent bien davantage qu’ils ne retiennent ! Ils commencent par une jeunesse mentholée et citronnée, avant que pêches, poires, oranges et abricots n’apparaissent, que leur maturité ne s’installe par ces touches qui font penser aux fruits laissés à confire. À mesure qu’ils avancent en âge, chacun comprend pourquoi les méticuleux introduisent des navires miniatures par le goulot : je vous invite à un voyage digne des caravelles ; poivre noir, gingembre et safran y répondent à la pelle.
Écrits couture
La famille d’Arche a fourni son content de comtes et d’histoires. Si le souvenir de Napoléon réveille des images de glorieuses conquêtes, si son classement de 1855 inscrit le grand cru du château dans le cœur des esthètes, notre épopée puise son origine dans une volonté plus discrète. En marge des crises qui s’entrechoquent et fissurent les époques, le chevalier itinérant a sans doute posé ses bagages dans la région bordelaise pour se couper des citadelles – une envie d’autant plus irrésistible que la nature y est belle.
Cet éternel personnage fait réfléchir les adultes et sourire les enfants : rêveur ému par tout ce qui le traverse, il s’égare parfois dans son panache, s’emmêle entre l’audacieux et le bravache. Son maître de chai haussera des épaules amusées, en repensant à toutes les fois où il lui a demandé le soleil ; son chef de culture sait pertinemment qu’il est trop facilement distrait dans les vignes pour ne pas en oublier un rang. Mais ne le réduisez pas à un illuminé, à un mystique qui se contenterait d’énumérer des théories depuis son fauteuil. À l’aise dans son temps, le chevalier d’Arche se lève aux aurores pour s’actionner, et entraîner à sa suite tous ceux qui partagent la même vision d’un royaume.
Extraits : LDLC
Portrait croisé d’associés, Laurent et Olivier
Érigée en success story au risque de commettre de regrettables raccourcis, la trajectoire de Laurent et Olivier de la Clergerie ne saurait être comprimée dans le cliché des étoiles contraires, ou tout autre monochrome trop net : au-delà des chiffres et des poncifs préconçus, il est des petites histoires qui gagnent à être connues. Outre une répartition des missions qui fait de Laurent l’architecte au trait franc et entier, d’Olivier le méticuleux maître de chantier, les deux frangins se rejoignent dans une cadence de l’entrepreneuriat où rien n’est éternel, sinon le pilier de la synchronicité fraternelle.
Si la fratrie de la Clergerie s’orienta effectivement vers l’ingénierie, ils n’eurent pas exactement la même approche de la discipline. À Laurent, déjà un rien provoc devant tout ce qui le choque, d’être l’angoisse des parents, toujours « ric-rac » de la moyenne, à préférer les tables de poker virtuelles à celles où les examens le rappellent. Sa ruse peu orthodoxe l’ayant adoubé The Fox sur Internet, le jeune hacker développa sa propension à casser les codes, à commencer par ceux du réseau étudiant – impliquant la complicité de celui que personne n’a jamais soupçonné.
Tel un bernard-l’ermite incessamment à l’étroit, LDLC connaît une croissance trop rapide pour demeurer longtemps au même endroit. Le groupe bondit à Dardilly, à Saint-Quentin, à Écully, ouvre des boutiques aux quatre coins de la France et déclenche des tics nerveux chez ceux qui prédisent un résultat désastreux. Mais au bout de la course, voilà qu’il arrive en bourse ; voilà qu’il emmène Olivier et sa carrure décisionnaire dans une seconde partie de carrière. Les initiales LDLC, réputées comme un incontournable du e-commerce informatique et high-tech, sont passées de la capitale des gones à celle de l’Hexagone, avant de traverser la France, la Suisse, la Belgique et le Luxembourg. Les deux frères, entourés par plus de mille collaborateurs ayant comme eux l’innovation dans le collimateur, ont ajusté leur mire bien au-delà de l’assemblage des ordinateurs afin d’essaimer dans d’autres secteurs, et de confirmer que des filiales pouvaient aller de pair avec les cartes mères.
Tous les geeks le savent depuis les avancées des processeurs : l’heure est aux structures qui hébergent plusieurs cœurs. Bien entendu, ceux de Laurent et Olivier seront toujours envoûtés par les nouveautés qui percent dans la Silicon Valley et ailleurs, mais la question se pose de regarder au-delà de graphismes plus fins, d’une escalade à la puissance sans fin. Laurent a donc pressé le bouton « reboot » sur ce projet de restaurant resté à l’échec, lui qui mangeait les pages de magazines culinaires à l’âge où les enfants se mettent n’importe quoi dans le bec. Et fidèle à ses fourneaux autant qu’il l’est à ses manières, l’agitateur continue d’interroger et de déroger à ce qui serait attendu, au risque de s’exposer au bâton qu’il aura lui-même tendu.
Portrait de collaboratrice, Christine
C’est en augmentant le pas de son ambition et en quittant son pays natal que Christine prit la décision d’un changement de vie radical. Et la France romanesque et romantique imprimée en image d’Épinal percuta une réalité plus épineuse ; très vite, l’originaire de Tsin Tao dut troquer sa routine pour le chaos. Entre la gestion logistique de premier ordre et la conduite de tractations serrées, Christine rend aujourd’hui un peu de cette fierté à son père entrepreneur qui lui inculqua la puissance de la valeur travail, rassure aussi une mère qui inventa tous les baratins possibles pour empêcher que sa petite Xin ne s’en aille. Les embarquant régulièrement en voyage à travers les continents « histoire d’apporter un peu de douceur dans leur quotidien », Christine se replace toujours sur la ligne de départ, parée à rassembler ce que le monde a d’épars.
Portrait de collaborateur, Yann
Depuis, le haut débit a peut-être chassé les pelotes de câbles pour connecter les unités centrales, il résonne encore l’écho des parties de Quake qui se disputaient rue de Marseille, les frags et les deathmatches poursuivis jusqu’aux aurores pour laver son honneur, avant de réceptionner le matériel dans la bonne humeur. Moins l’élu d’une prophétie pour sauver le royaume que celui d’un système fondé sur d’aventureux axiomes, Yann se fait aujourd’hui le garant d’une intégrité que la croissance du groupe ou les effets de mode ne sauraient ébrécher.
Portrait de collaborateur, David
Le goût du labeur glané en terres finistériennes, David fila ses désirs d’imaginatif dès son retour à la vie civile, où un BTS en informatique et quelques CV peu denses, mais très graphiques, lui assurèrent une entrée active sur le marché. À la veille de la trentaine, il s’inscrit parmi les pionniers du e-commerce au sein d’agences parisiennes à la pointe. Il se souvient des prémisses du secteur que seuls les plus impliqués comprenaient ; des journées passées à plancher, des nuits en lits de camp installés sur place, des soirées enfumées, des idées fumantes et des budgets alloués sans latence.
Portrait de collaboratrice, Dominique
Le point d’orgue d’une carrière durant laquelle Dominique ne fit jamais preuve d’orgueil, quand bien même son humeur constante et sa gouaille légendaire, remarquées partout, lui ont érigé une réputation d’affable à l’écoute. Il faut dire que la Technicienne de surface ne s’est jamais contentée d’y rester lorsqu’elle tissait quelques affinités à l’occasion d’une pause ou d’une discussion à la volée. De son quart d’heure rituel en compagnie d’Olga, directrice de la compta, à ses déjeuners partagés à l’accueil, aux côtés de Catherine, c’est à force de conversations en pagaille qu’elle s’est hissée à un niveau de savoir que pourrait envier n’importe quel RH ; Dominique connaît les manies de Marie, les habitudes de Harry, les anecdotes glanées à l’informatique jusqu’aux emplois du temps de la logistique.
Portrait de collaborateur, Basil
Amenez un Livreur à se livrer, il se produira des effets à réception. Si son métier pris à cœur lui a conféré une renommée d’ambassadeur, Basil soigne une discrétion de fond, lui qui pourrait d’ailleurs en être le convoyeur. Diplômes en logistique classique et sa variante humanitaire, licence en géographie et qualité d’agent de maîtrise en commerce – toutes ces qualifications étagées pourraient en encombrer d’autres, ce sont surtout les qualificatifs élogieux de ses clients dont il souhaite être l’apôtre.
Extraits : LE COMPTOIR DE MATHILDE
Portrait de dirigeant, Richard
Le verbe franc en vigueur et le tutoiement de rigueur, Richard est de ceux qui ne sauraient camoufler leurs affects, pas même dans les affaires. Et parce que sa loyauté tient plus de la bonhommie que des discours de bonimenteur, c’est avec un seul BEP compta que Richard est devenu quelqu’un sur qui l’on peut compter. Fidèle à ses premiers fournisseurs, il les sollicite et les garde dans son cœur, quand bien même il pourrait trouver moins cher ailleurs. Un homme qui fédère et qui a aussitôt permis à chacun de trouver en son Comptoir une raison d’y croire.
Et si vingt-cinq années d’entrepreneuriat pavèrent la piste menant à l’épicerie fine, le fondateur du Comptoir de Mathilde a cheminé avec un bagage assez rempli pour satisfaire les appétits, et exercer cette science de faire bombance. À commencer par l’arrière-boutique du foyer familial, cette boulangerie où, à tout moment, s’éveillaient quelques fringales. Dès ses plus jeunes heures, fleurant bon la brioche au beurre, Richard calqua sur ses parents la hargne et le goût du labeur. Les effluves de cacao, que le paternel pâtissier laissait dans son sillage, étaient d’ailleurs autant de présages à la future activité d’un gourmand invétéré. Si la confection de joyeusetés chocolatées et de spécialités invitant à la convivialité tenait pour lui de l’évidence, Richard trouva moins son talent dans le travail de l’artisan que dans la gouaille du commerçant.
L’effet de la réussite entraîna Richard et « la poignée de fadas » dans des journées rythmées par des zestes de citrons de Menton épluchés par montagne, des déjeuners partagés arrosés d’un peu de vin, et des au revoirs de courtes durées. La signature gustative soigneusement emballée comme à l’ancienne attira d’emblée des petits commerçants prêts à rejoindre, en toute franchise, le modèle original. Richard doubla ses fonctions d’entrepreneur en y ajoutant celles de franchiseur. Les élans insouciants devinrent pragmatisme sourcilleux, et Le Comptoir de Mathilde essaima sa bonne humeur par-delà la Drôme, de sorte que ses devantures sont désormais autant de points cartographiant l’Hexagone.
Portrait iconique de marque
Qu’elles s’étalent sur la clameur d’une rue passante ou se nichent dans le tumulte d’une avenue marchande, nos boutiques ont le don d’encapsuler tout un monde au point d’en faire oublier celui qui gronde. Le Comptoir de Mathilde compte assez de divines sucreries, et de mets d’épicerie fine, pour que le visiteur presque tenté devienne un habitué patenté. Passée l’entrée, il est catapulté dans une époque qui lui semble familière, comme monté à bord d’une machine à remonter ce temps qu’il aurait aimé connaître. Une atmosphère nostalgique enveloppante, habituellement réservée aux mamies gâteaux, aux commerçants qui empaquettent les francs en rouleau, aux musiques doucement désuètes, aux airs de polka, au charme des polas, aux bonbons, caramels et chocolats. Derrière la caisse de chacun de ces magasins, un trompe-l’œil différent saisit encore le nôtre. Habillés des menus détails de ces peintures à la main, les murs portent fièrement l’emblème de la ville, l’icône des environs ; à Lyon, l’atmosphère du quartier de Saint-Jean répond au somptueux passage Pommeraye de Nantes, et le téléphérique du Mont Faron se dessine à Toulon quand le pont se voit croqué à Avignon.
Il n’est peut-être pas ici question de succession traversant les siècles de génération en génération, mais ce respect des valeurs, et de la tradition, fut enseigné dès le biberon. Finalement, sans hériter d’une devanture, Richard Fournier s’est lancé dans cette aventure comme on chercherait un trésor ; prêt à bâtir un monde à part pour réunir des parcelles de réconfort. Un hommage à cette chocolatière de Montbrison qui s’est dédiée au travail – sa grand-mère, dont la présence rassurante suffisait à se faire sentir comme au bercail.
Du côté des boutiques du Comptoir de Mathilde, on ne vend que ce que l’on élabore ou fabrique. Les classiques régressifs ravivent même les goûters d’autrefois, et réunissent les enfants d’aujourd’hui autour d’un quatre heures d’euphorie. Les saveurs venues d’ailleurs, elles, parfument les paniers cadeaux, étoffent les retrouvailles improvisées autour d’un apéro, les repas où s’invitent les envies partagées et les moments de vie à graver. Quant aux épicuriens les plus curieux, sûr que leur audace trouvera satisfaction à l’ombre de quelques innovations maison, de ce vinaigre à la mangue à ce chocolat crépitant sous la langue. Dès lors, promesse est faite que d’une bouteille ou d’un pot vide, naisse le désir de pousser à nouveau la porte du Comptoir de Mathilde.
Extraits : ATELIERS JOUFFRE
Portrait iconique de marque
Le tapissier a cette habileté dans les doigts qui module la matière sans barrière, cette vision des volumes peu commune qui s’allume à la mention de mousses ou de plumes. Au sein des Ateliers Jouffre, il silhouette de ses ciseaux des tissus voués à se draper en toute dignité, manipule le fût comme un potier sculpterait l’argile sur son tour, interprète le tracé en jonglant avec les outils et un jargon aussi ancien que racé.
Reconnaissables à leur signature épurée, à l’exactitude d’une époque contemporaine où la simplicité est reine, les Ateliers Jouffre continuent de construire sur ce que les siècles ont su instruire. Les artisans connaissent bien l’adage : cent fois sur le métier, ils remettent leur ouvrage. Entre le guindage, l’anglaisage et les carrelets, l’aiguille courbe qui pique et façonne le bourrelet en crin ; entre son lexique et l’héritage de ses techniques, sûr que le métier de tapissier a décidément son mot à dire. Au-delà de la noblesse des lettres, les talents Jouffre cultivent la noblesse de l’être. Ils respectent toutes ces petites histoires avant l’heure qui formèrent la grande – elle est aussi la leur. C’est dans les lignes d’étoffes croisées que Charles Jouffre a apprivoisé un avenir dont il ignorait les aboutissants.
Lui qui se projetait au mieux petit tapissier de quartier s’est laissé initier à la très haute décoration par le maître des lieux, qui l’introduit à tous ses chantiers, à leurs menus copieux. Afin de remédier à son talon d’Achille, Charles planche pour deux ; l’élève a su asseoir son expertise des sièges par quelques cours du soir glanés aux Beaux-Arts. Lassé de constater que les créations françaises s’enferment dans les éternelles influences impériales et baroques, Charles ne pouvait que s’envoler au Gabon, aux USA, au Maroc, dès que l’opportunité lui fut offerte d’empoigner la planète dans sa paume ouverte.
Portrait de collaborateur, Lionel
Quittant en quatrième vitesse cette école qui tenait à l’étroit son adresse, Lionel Munck s’engagea sur les routes du compagnonnage afin d’acquérir un savoir-faire qu’on croirait issu d’un autre âge. Armé d’un œil à la hauteur de sa fidèle machine à coudre, le tapissier des Ateliers Jouffre se fait habile de l’aiguille, et habille les carcasses attendant d’être remplumées, matelassées, garnies de cuir ou de tout autre matériau exotique voulu par certains commanditaires quelque peu excentriques. Surpiqûres et énigmes de structures ne faisaient certes pas le poids face à celui qui veut toujours occuper ses dix doigts. Alors Lionel alla décrocher le sésame ultime, celui qui jauge les efforts et les prime ; un titre de MOF sur lequel l’humilité s’interroge bien plus que la suffisance ne s’en couronne.
Portrait de collaborateur, Franck
Il y a chez Franck tous les côtés d’un personnage fantasque qui n’aurait pas dépareillé entre les pages d’un Franquin, une facette de roublard bavard qui fleure bon le souvenir de Vautrin. D’avoir tant manié la gomme pour effacer ses traces sur la feuille, l’humble dessinateur semble superposer plusieurs hommes en un seul : tour à tour livreur, vendeur de canapés, ouvrier toujours banco pour taper ou dresser du placo, restaurateur d’estomacs puis de mobilier, son parcours atteste que piocher dans tous les rayons a alimenté, mine de rien, celle de son crayon.
Extraits : LE BON MARCHÉ
Portrait de collaboratrice, Charlotte
La tradition fait un vilain défaut de la gourmandise, mais pour Charlotte, il faut assurément pêcher dans ce vice capital pour préparer de capiteuses friandises. L’Adjointe au chef pâtissier ne pourrait s’ennuyer de ce lieu où pétillent les papilles : ciselées comme des lapislazulis et confectionnées sur place, nappées de coulis ou saupoudrées de sucre glace, les créations se réinventent avant que le palais ne s’en lasse.
Portrait de collaborateur, Hakim
En tant que Chef boucher de La Grande Épicerie de Paris, Hakim s’échine donc à froisser les clichés qui figent sa filière dans des silhouettes bourrues, aux façons de bourrin. Et bien qu’il lui faille soulever sans ménagement des carcasses de cent-dix kilos, et y aller franco pour en détailler le moindre morceau, in fine, c’est toujours la finesse de la découpe qui prime, la précision de la présentation qui donne à la bonne chère un tout nouvel attrait : séduire la vue avant de combler le palais.
Portrait de collaboratrice, Vinciane
Dans la cave de La Grande Épicerie de Paris Rive Droite, la lumière ne laisse aucune place à la pénombre : mieux, elle jette ses rayons sur des bouteilles en nombre. Ici, les années défilent au gré des cépages et de leurs assemblages ; les terroirs, cuvées et étiquettes s’affichent en ribambelle, si bien que sous le charme de ce plafond voûté, on ne compte plus les bouchons à faire valser.
Portrait de collaborateur, Arnaud
Étoffant son équipe jusqu’à devenir référent, Arnaud embrasse cette chasse à la « petite bête » qui le caractérise et l’électrise dès qu’il empoigne ses outils, si bien que Le Bon Marché est légitimement couronné pour sa fiabilité sans faille et son amour du détail. Qu’importe s’il faut se lever aux aurores, bien avant les réveils, puisque c’est dans le silence des heures solitaires qu’Arnaud ausculte au mieux ses patients de fer. Paradoxalement, pour un horloger qui se sent à sa place, c’est un plaisir que le temps passe.
Portrait de collaborateur, Nicolas
Posté derrière le desk et paré aux questions qui s’apprêtaient à lui être posées, le néophyte façonna trois ans durant une posture d’impeccable : body language et parole sans à-peu-près, mais toujours à-propos. Alors, quand le conseil en achat prit son essor, celui qui est à l’écoute de la moindre vibration agitant la mode eut à cœur de prouver qu’une telle fonction était de son ressort. Par-delà les sessions qui laissent volontiers les minutes s’égrener, où se croisent les tenues, les teintes, les marques convoitées et les remarques éclairées ; par-delà la ferveur de déclencher d’intenses réactions grâce à une dentelle de Calais ornant une pièce de créateur, c’est à la marge de ce quotidien parfois fantasmé qu’affleurent tous les efforts du Personal shopper.
Portrait de collaborateur, Ousmane
La sécurité et les rouages bien huilés sont devenus le centre de son attention, car Ousmane a filé une carrière piquée par les enjeux logistiques, et entamée dans la manutention. Il a suffi d’un job d’été en tant que magasinier à l’aéroport de Roissy, pour que le diplômé d’un bac pro en électrotechnique quitte les bancs d’école sans ambages vers les pistes de décollage. Progressant sous la houlette d’un supérieur passé par l’armée, le jeune homme résista à la pression de l’urgence et décrocha ses galons de chef d’équipe en gérant l’acheminement des avions en kit : roues, moteurs, sièges et cockpits. S’il éleva également le niveau de sa gymnastique en affrétant pour les sociétés pétrolières des cargos Beluga, Ousmane fit le choix de se défaire de la raideur de son secteur pour un univers plus raccord à son goût pour la finesse et le courtois.
Portrait de collaborateur, Thibault
Avec son humour, cette aisance à se joindre aux intérêts des jeunes pousses et sa chevalière stormtrooper au doigt, le Conseiller de vente est à sa place parmi ces monts de jouets colorés, en plastique, en mousse ou en bois. Si Thibault assure ses responsabilités avec un sérieux retranscrit dans les rayons, les stocks et une manutention des plus carrés, l’affable vendeur n’hésite pas à donner de sa personne pour concevoir des univers immersifs dont la mise en scène laisse béat, à se montrer à la hauteur des minots trépignant devant ces trésors qui leur tendent les bras.
Extraits : GRAND LARGE YACHTING
Portrait de collaborateur, François
Alors que l’autodidacte réparait et bidouillait ses bateaux sans jamais aller au bout, il peaufina ses connaissances apprises sur le tas par une formation en automatisme. Depuis, François confirme que le travail manuel n’a rien de la bricole, et qu’il peut être bon de passer un peu de temps sur les bancs d’école. Entre les journées à carréner et les mois à œuvrer dans l’estrudage plastique, son entrée sur le marché du travail vit sa ferveur se réfréner. Le coup de fil d’un camarade de promo crut raviver les espoirs de François, qui finit par se retrouver au bon poste, au mauvais endroit. Plutôt que les paysages de granit et les brises de Breizh, François se contenta du ciel lourd du Cotentin, de cette Normandie au caractère renfermé qu’il ne quittera pourtant plus jamais.
Extraits : Villa Cybèle
Portrait iconique
De la mémoire lyonnaise, on dit de moi que j’incarne la vigie privilégiée : il y a deux-mille ans de cela, je rugissais déjà dans les vallons, alors que Lugdunum ne tenait rien du lion. Mais n’allez point vous imaginer, mes chers amis, que Saint-Just ne serait qu’un fossile figé dans son jus. Perché sur mon magistère, je rayonne sur Fourvière, et rappelle à l’envi à mes homologues que je surplombe, que leur destin sera toujours d’être tapis dans mon ombre. Si l’UNESCO a classé mon quartier dans son patrimoine mondial, car je symbolise du génie humain un certain idéal, jamais je ne me délesterai de la bonne tenue de mes domaines. Plus que tout, je conserve leur éclat, celui de mes résidences et de mon passé, comme autant de pierreries constellant un diadème. C’est ainsi que, blottie en mon sein, entre les saphirs et les gemmes, se distingue la Villa Cybèle.
C’est vrai, j’incline plus au modelage des évolutions qu’aux fracas des révolutions. De mes artères médiévales à mes ruelles pittoresques, de mon théâtre gallo-romain à ma magnifique basilique, j’accueille parmi les plus somptueux édifices de la cité aux deux fleuves. Quoique situé dans le centre – la presqu’île est à mes pieds –, mon havre est piqueté de squares et de commodités ; les écoles côtoient toutes les échoppes de proximité. Bercé de quiétude et rayonnant de vie, à rebours de la foule qui virevolte, je n’en suis pas moins ce quartier fringant, primesautier et plein de joie. On me sait accessible ! Mon ancrage au tumulte du Vieux Lyon, où guinguettes et restaurants crapahutent tous azimuts, ne tient d’ailleurs qu’à un câble. Celui du funiculaire rappelle que pour rien au monde je ne me voudrais excluant, même si le bien que je vous dévoile se veut résolument exclusif.
Extraits : VEOLIA
Portrait de collaborateur, Florent
Lui qui se rêvait astronome étant petit ne se complaît ni dans les chimères ni dans les utopies : son regard a beau fouiller la voûte céleste, ses mains le compost, c’est les pieds chevillés sur terre qu’il veille aux avant-postes.
Portrait de collaborateur, Jean
Quand certains qualifient les aubaines comme de « l’or en barres », voilà longtemps que Jean s’est immergé dans le bain algorithmique qui change les bars en or. C’est à partir de relevés de pressions que le Data Scientist prévoit aussi l’évolution d’une consommation ou détecte une fuite pour intervenir au plus vite.
Portrait de collaboratrice, Laure
S’assurant de la pureté des eaux rejetées, jonglant avec les éléments, cette campagnarde invétérée s’épanouira toujours mieux au grand air, loin des bureaux qu’elle considère pénitentiaires, dans un paysage où poussent machines et inventions frôlant la science-fiction.
Portrait de collaborateur, Boris
Mais avant de remonter cette pyramide inversée dont il a exploré toutes les strates, le taiseux de Normandie quitta les automnes moroses à la Maupassant pour retrouver Lyon et des études qui font sciences. Au sein de l’école d’ingénieurs INSA, la spécialisation assainissement de l’eau potable et les cours de biochimie s’agrémentaient néanmoins de quelques projections au sein d’un ciné-club propres à satisfaire sa soif de culture et d’ouverture.
Extraits : MAISON CLOSE
Portrait de dirigeant, Nicolas
Tandis que les idées tourbillonnent entre deux bouffées de cigarette, que l’air enfumé se trouble davantage par l’apparition de félines silhouettes, un verre de sancerre censé irriguer l’imaginaire exhale, et une feuille se tient prête à recevoir le tracé franc de Monsieur le Français. Se passant de critères comme de décorum, son critérium échafaude là un porte-jarretelle happant les désirs en bataille, croque ici une lanière de dentelle prenant ses attaches de la nuque à la taille.
Monsieur le Français imprime sur la lingerie une nostalgie d’une époque qui lui restera à jamais inconnue. Les années vingt et leur folie sulfureuse, cette signature surannée et ses effeuilleuses, le charme canaille et le paname des lupanars, leurs artistes mondains de Cocteau à Bernhardt, et autant de femmes portées en icônes chamarrées par les affiches d’Alfons Mucha. La géométrie et la précision de l’Art déco deviennent, elles, la trame d’une structure old school, d’une conception faisant fi de l’à-peu-près et de la surenchère, tant Maison Close s’acoquine avec des sous-vêtements ayant pour soubassement une découpe saillante, nette et claire. Mais c’est encore dans une ère plus récente que Monsieur le Français est allé piocher son égérie ravageuse. Avec sa voix grave, ses tailleurs Mugler et Saint-Laurent, son instinct pour le beau et l’élégant, sa tante marqua en lui quelques canons détonants ; un bagout qu’il immortalise aujourd’hui dans un noir et blanc aussi élégiaque qu’envoûtant.
Et malgré son enchantement pour les échancrures du genre accru, la pudeur finit toujours par emporter celui qui ne saurait se mettre à nu avec la même aisance que se défont ses empiècements. Une volonté d’exil et de discrétion qui écorne l’étiquette du tenancier irrévérencieux, de l’outrancier licencieux qu’un jugement hâtif lui collerait volontiers. Car il n’y a guère que les muses et les copains, les instants avec ses deux galopins, qui pourraient déverrouiller cette intimité au sein de laquelle Monsieur le Français s’éploie sous les lignes de Nicolas. Pour l’heure
– et seulement pour celle-ci –, les dessous prennent le dessus, à l’image de cette culture de la confidentialité qui scella les portes de Maison Close, et enjoignait Nicolas à s’effacer sous le profil de Monsieur le Français.
Écrits couture
Par quelques traits feutrés, Maison Close décèle les pensées les plus confidentielles, cultive sa particularité de troubler les sens avec l’art et la matière. L’art de créer de nouvelles lignes en partant d’une simple page blanche, l’art d’ériger en marque désirable ce que le vêtement rend de plus captivant. La matière, qui tour à tour tamise, accentue, dissimule ou dévoile, la matière qui épouse un état d’esprit avant même que le corps n’en soit épris.
Voilà que les opacités, les mats et les brillances, les nuances irisées et les jeux de transparence suscitent un réflexe cérébral et instinctif permettant à la retenue de se faire la belle : après le regard, le toucher s’en mêle. Cette décharge sensorielle brouille les repères et galvanise les élans du cœur ; un éveil à la liesse comme à la langueur. Car sous une beauté sans cesse réinvestie, sous les courbes inlassablement redéfinies par des contrastes surlignant les contours, Maison Close ébruitera toujours sa façon iconoclaste de célébrer l’amour.
Extraits : KAESER COMPRESSEURS
Portrait de collaborateur, Olivier
Il sillonne les routes du Limousin et se montre capable sur l’entièreté de la région PACA, en choyant le réseau historique de distributeurs, d’intégrateurs et de loueurs qui font la puissance de Kaeser. Conseillant et développant la clientèle en direct afin que les compresseurs ne soient plus comprimés à un seul canal, ce gourmand de cultures, résolument baroudeur, considère chaque destination en mode même pas peur. Olivier essaime ainsi son sens du relationnel sans jamais verser dans le sensationnel, conscient qu’il suffit parfois de laisser l’excellence parler d’elle-même.
Portrait de collaborateur, Mathieu
Mais qu’importe où son vélo et ses foulées le mènent : au bureau, au zoo, devant une usine ou au bois de Vincennes, son œil retors ne peut s’empêcher de déceler les compresseurs plantés dans le décor. Après tout, les infimes tourments de cette fixette sont surtout les garants d’un profond sens de l’engagement – dans la vie en général et chez Kaeser en particulier, Mathieu est convaincu qu’avant de recevoir, il faut savoir donner.
Portrait de collaboratrice, Jaël
À l’époque où elle appréhendait à peine ses manies de maman poule et tentait déjà de maîtriser la vitesse de son pouls, Jaël débarqua dans l’entreprise spécialiste des compresseurs par l’entremise d’un ami, sans en connaître le moindre enjeu ni défi. Tout juste partageait-elle un ancrage allemand avec le groupe, la fille de militaire ayant vu défiler les années quatre-vingts non loin de Baden Baden, là où les bons souvenirs entre copines et chocolat chaud reviennent, reviennent.